• La tuque d'Hérépian.

     

     

     

     

    Alors! Raconte! N° 110

                                         La tuque d'Hérépian.

                Ce village encerclé par Bédarieux, Lamalou les Bains, et Villemagne l'Argentière, aux fins fonds de l'Hérault a hérité d'une "tendresse infinie" des villages voisins dont la rivalité entre eux n'a cessé pendant des siècles.  L'orgueil, la réussite, la richesse et surtout séduire une fille de leur village  n'étaient pas bien vus des gens d'Hérépian. On ne se mariait qu'avec la promise du village. D'ailleurs, c'est la raison de la consanguinité de l'arrière pays. La réputation locale de ce village vient d'un surnom "fruits et légumes" que les voisins qui tournent tout à la dérision ont affublé aux Hérépiannais d'une étiquette peu flatteuse, celle de "tuquiers" dont l'origine vient d'un fruit gros, charnu, lourd à la peau dure et colorée, d'une cucurbitacée digne pour une courge du sobriquet de "tuque". Il est vrai que la culture maraîchère de cette plante a été favorisée par une terre riche, des cours d'eaux abondants et de bonnes sources. Durant des siècles les cours de l'Orb, de la Marre, du ruisseau Rieu- Pourquier, par leurs inondations ont apportés des limons fertilisant les sols si bien que les habitants ont tiré de bons profits de la culture des "tuques". Les voisins jaloux ont vite fait d'associer produit et producteur et même actuellement les Hérépiannais supportent l'affabulation des caractéristiques de cette courge.

                  "A  lou cap commo uno tuqua" (Il a la tête comme une courge).

                   " Tu es courge" ( Tu es bête)

              Et bien vite ces racontars ont rendu célèbres les habitants d'Hérépian. D'ailleurs, réciproquement, ces mêmes personnes appelaient les habitants des Aires, village voisin de "melons"et ceux du Poujols de " concombres". Les noms de légumes pleuvaient allègrement.

               Mais enfin, comment est née cette appellation de" tuquiers" à Hérépian.

           C'était une après midi sombre de novembre. Le vent soufflait en tempête dans les vignes et un "brave" homme après avoir taillé ses ceps  s'empressait de les " escaousseller" (déchausser les souches) quand soudain, il entendit un sifflement plaintif venant d'un buisson tout proche. Pensant qu'un voisin l'appelait, ce lourdaud lui crie : "Au lieu de siffler, approches toi pour me parler! " Mais bizarre!  Personne ne se manifestait et le sifflet était de plus en plus fort. Il décide de voir plus prés et s'approche du fourré d'où provenait le sifflement. Le vent redoublait de violence et ce sifflet lugubre s'amplifiait dans le soir qui tombait. Pris de panique il détala à toute vitesse, les jambes à son cou vers le village. Il s'arrêta au café pour se remettre de ses émotions et paniqué après quatre pastagas bien serrés, il raconta aux autres ce dont il avait été témoin. " C'est un sifflet strident venu de l'enfer" , dit-il. En peu de temps tout le village était armé prêt à combattre ce siffleur invétéré et, se dirigeant vers la vigne  de ce "brave homme", ils entendirent encore plus fort ce lugubre sifflement. Ils cherchèrent parmi les herbes, dans "l'hermas" voisin, mais personne en vue. La serpe à la main aucun des courageux n'osa s'approcher. Ils avaient surtout peur de voir le diable en personne car le curé du village dans ses sermons leur avait parlé de Lucifer et de Méphisto le démon carnivore. Au bout d'une heure, un grand garçon, costaud et un des plus courageux, sentant le départ imminent des autres, sans plus attendre se précipita dans les grandes broussailles ,fouilla, retourna tout sur son passage et finit par trouver l'objet qui donnait la peur générale. Il porta au dessus de sa tête une très grosse courge vide de son contenu et trouée pour que le vent fasse entendre ce sifflement si singulier. Le siffleur démoniaque venait d'être démasqué et triomphalement les villageois se le passèrent de main en main et firent un tel vacarme que les habitants du village voisin accoururent pour voir ce qui se passait. Voyant tout ce désordre, ils se mirent tous à rire de voir que les Hérépiannais avaient eu peur d'une courge et ils se moquèrent d'eux. Cette histoire se colporta de clochers en clochers dans tout le canton.

                 Ce sobriquet s'est ancré dans les mémoires. Court, facile à retenir, amusant, tous les voisins du village d'Hérépian interpellent leurs habitants du surnom de tuquier.

                 Depuis février 1994, une soirée est organisée pour remémorer la tradition. Les jolies serveuses, habillées de vieilles robes de leurs ancêtres dont le décolleté pigeonnant laisse deviner de toutes petites courges pour faire honneur à ces cucurbitacées.  Un concours de tuques est organisé pour comparer les plus belles productions de l'année. En 2011, la plus grosse pesait près de 150 kg. En novembre la "ronde des tuques" rassemble 120 coureurs à pied au départ devant la mairie pour un périple de 13 km. Le premier prix est une superbe courge en bronze.

               La tuque figure sur le logo de la ville. Les murs intérieurs de la mairie sont décorés de courges en plâtre.

                Cette histoire, née d'un banal fait divers, a permis aujourd'hui à la population de se rassembler autour d'une table où la courge est mise à l'honneur sous forme de tartes, de soupes, de gratins, de purée, de confitures et d'autres recettes que seuls les Hérépiannais savent confectionner.

    JC d'Oc 02/2012

     

     


  • Commentaires

    2
    JC d'Oc
    Samedi 9 Août 2014 à 11:49

    Bjr  

    Je vois que les quelques petites histoires sur nos villages du Midi sont lues par plus de 4000 personnes. Au sujet de l'orthographe du mot Hérépiannais, vous me faites voir qu'il y a sûrement une faute  car en consultant le site de la Mairie , il est écrit avec 2n, mais j'écris des mots depuis plus 78 ans  comme je les vois car la plupart des noms des habitants de nos villages se terminent pars un Nais.(Cébazanais, St Chinianais ....) Merci pour votre  commentaire et prenez plaisir à lire les 139 articles qui composent mon blog ''  jc34.eklablog.com "   A bientôt pour goûter les parfums de notre lavande, pour ressentir l'émotion qui s'échappe des petits cairns de Minerve, pour tout le plaisir que ma lecture peut vous apporter.

    JC d'Oc

    1
    YM
    Mercredi 6 Août 2014 à 09:19

    Bjr,

    Je vois que vous écrivez (comme moi) Hérépianais avec 1 N. Avez-vous des informations sur la véritable ortographe du gentilé : 1 N ou 2 N ?

    Merci de votre réponse

    YM

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