• Le château de Sériège

     

     
       

    Alors! Raconte! N° 103                                                                                                                                                                  

                                             Le château de Sériège

           La culture de la vigne a débuté du temps des Grecs, puis au 1er siècle les Romains ont implanté cette culture dans le Biterrois et les Corbières. Le temps passe et la vigne pissait son vin et il remplissait les foudres dans les caves.

           A la fin du XIXème siècle " l'or avait la couleur du vin". La viticulture rapportait beaucoup d'argent et même de trop.  Les propriétaires étaient tellement riches qu'il fallait le montrer et par orgueil, il fallait avoir un château plus beau que celui de son voisin. Le château de Sériège était l'image de la réussite et montrait la fortune de son propriétaire dans cette époque viticole où tout était permis. Il suffisait en 1880 d' un an de récolte pour payer la construction d'un château tant la vigne rapportait. Il fallait faire du tape à l'œil et les familles nobles excellaient  dans ce genre.Comme on dit dans notre Midi  " c'est un château qui a de la bouteille".

          Situé en bordure de la route à trois kilomètres de Cruzy, dans un grand bois de pins où l'on aime respirer la résine et écouter en été le chant des cigales le maire de Cruzy Alexandre d'Andoque décida donc d'édifier pour son petit neveu seul héritier de son vaste domaine le château de Sériège.  Construit en 1884 par un entrepreneur local, Andoque voulut s'inspirer du style renaissance italienne pour donner plus de clinquant à son château. Mais c'est un château " paravent". La façade est considérée comme cache- misère pour le reste du bâtiment. A l'intérieur un escalier monumental et un ascenseur équipé d'une corde était tiré par le personnel pour monter à l'étage les invités, devaient continuer à impressionner les visiteurs. C'était du "bling bling" surtout qu'il fallait passer au premier étage d'une chambre à l'autre sans couloirs pour aller se coucher. En fait, ce château était inhabitable et il n'a jamais été habité. Le "Vieux de Sériège" voulait-il jouer un bon tour à son petit neveu !

        Mais le château de Sériège aussi beau qu'il soit n'a pas échappé aux aléas de l'histoire. Il n'a jamais été le digne représentant des" châteaux pinards" du Midi, mais il a été l'acteur lors des grandes grèves de 1904-1907 dont le meneur était Marcelin Albert, cafetier à Argeliès village voisin qui leva la bannière de la révolte viticole.

         A peine installé sur le domaine qui à l'époque  était le fleuron des domaines viticoles languedociens avec ses  354 hectares d'un seul tenant dont deux cents plantés de vigne, le neveu Alexandre d'Andoque est confronté aux premières grèves de 1904 . La propriété produit trop de vin. Sa cave accueillait quarante mille hectolitres et ne pouvait engranger la récolte de l'année qui arrivait avec quinze à vingt mille hectolitres supplémentaires. La production annuelle du Midi dépasse alors les 21 millions d'hectolitres. Le prix de l'hectolitre de vin chute de 41F an 1880 à 6F en 1900. Les grèves, son mariage raté, la mévente, excédé, Alexandre d'Andoque vend sa propriété à Edmond Bartissol, député des Pyrénées Orientales. Il part s'installer à Montpellier.

           Le 8 octobre 1906, le régisseur congédia une soixantaine d'ouvriers journaliers, ne conservant que vingt gagés. La réaction fut immédiate. Les ouvriers congédiés empêchèrent la sortie des chais du vin nouveau. La pression  monte et le fondé de pouvoir de Bartissol, ancien Ministre des Travaux Publics, fait appel à la troupe. Une compagnie du 100ème  Régiment d'infanterie et deux pelotons du 13ème chasseurs sont reçus à coups de pierres par les grévistes, blessant quelques soldats. Par la suite Bartissol fut obligé de reprendre une cinquantaine d'ouvriers.

            En 1910, Bartissol revendait le château et ses terres à André d'Andoque. Par héritage, l'aîné de la famille le colonel Alban d'Andoque prit la succession.

        Aujourd'hui, le domaine est resté dans la famille Andoque. Il  appartient à son fils aîné Gilles et à sa femme Geneviève qui depuis 1948, tradition oblige, ont connu une cinquantaine de grèves jusqu'à aujourd'hui.

         Le château fantôme n'est toujours pas habité. Seules les pièces du bas servent à conserver quelques barriques de bon vin.

    JC d'Oc 11/2012.

     

             


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