• Les traditions festives dans les années 50

     

     

      
      Alors ! Raconte ! N° 34

     

     

     

     

     

                              Les traditions festives dans les années 5O.

     

     

     

              Après la dure journée de travail, la peau tannée par le soleil, il fallait forcément, de temps en temps lâcher la soupape et dans les villages de l’ouest de l’Hérault, dans le Saint Chinianais surtout,  il fallait se défouler. De ce défoulement, pas toujours  catholique mais diablement  recherché, seuls les anciens qui vécurent leur enfance dans le village de Cébazan peuvent en témoigner. On s’amusait avec peu de chose. Tant que l'on ne connaissait pas la vie, on se contentait de ce que l'on avait. Inutile de brûler des voitures. Il n’y en avait pas, ce qui ne nous empêchait pas de nous déplacer à bicyclette où sur la 125cc Peugeot, les filles à l'arrière.

     

              Commençons par la pratique de la tournée du ‘’ barricot’’

     

               C’était un joyeux porte-à-porte nocturne destiné à se faire offrir de généreuses rasades de vin blanc (carthagène et muscat de préférence). Le vigneron ouvrait grande la porte de sa cave aux jeunes et moins jeunes. Les tonneaux étaient mis en perce. (On enfonçait le robinet dans le trou du bas). Puis les verres bien pleins, le vin blanc était apprécié. Il fallait goûter à tous les tonneaux.  Certains vignerons, plus malins que d’autres,  fermaient le portail  et gardait la clef de leur cave sur eux si bien que les festoyeurs ne pouvaient sortir que dans un état d’ébriété avancé. Seule sanction, la gueule de bois le lendemain.

     

               Continuons par le jeu du ‘’martelet’’

     

               Dans ces virées tonitruantes, on ne s’arrêtait pas au premier verre. On continuait par un jeu aussi simple que redoutable. On attachait un marteau ou diverses ferrailles à la poignée de porte d’une habitation. On les actionnait à l’aide d’une corde et ça tambourinait jusqu’ au réveil du propriétaire. Celui-ci n’avait que deux choix. Soit il était costaud et en braillant faisait fuir les fêtards, soit il offrait un coup à boire. L’alcool faisait vite office du meilleur médiateur qu’il soit. On ne pensait que ripailles et beuveries. La paix sociale se trouvait miraculeusement rétablie si un casse-croûte était offert en plus.

     

                    

     

                     La soulinque.

     

     

     

                 La fin des vendanges était fêtée dignement car elle représentait le résultat du travail de toute l’année du viticulteur. Pour que tout le monde, patrons et ouvriers agricoles se rappellent de ce jour mémorable, la maitresse de maison préparait un repas digne de Bacchus. Pendant que le jus de raisin fermentait à sa guise dans les cuves et les foudres, on préparait les festivités en sortant tables et chaises dans la cour. Cette fête était appelé la ‘’ soulinque ‘’ non pour abuser du précieux nectar, mais pour fêter la fin des vendanges et présenter au vigneron toute notre admiration sur la qualité de son vin de l’année précédente. De plus en connaisseur, on parlait ‘’degré’’, cépages (carignan, aramon, terret, malvoisie, grenache et bien d’autres). La quantité était comptée en nombre de comportes et de cuves pleines.

     

                 Le repas commençait toujours par l’apéro (bien sûr, du muscat et pour les femmes du quinquina). S’en suivait plusieurs entrées. Le patron sortait ses bouteilles de vin vieux. On levait toujours son verre en regardant le maître de maison. Entre les plats, on faisait le trou ‘’de Madame’’. Aucune connotation avec ce que vous pensez ! Puis s’en suivait le plat du chasseur : lièvres, lapins, perdreaux accompagnées de cèpes sautés dans l’huile d’olive. Le ragoût aux olives avec sa purée. Puis le seul, l’unique de l’époque, le roi des fromages, le fromage des rois – le célèbre  ‘’Roquefort’’ que l’on tartinait sur des tranches de pain avec des trous. La joie montait dans l’assistance. On enlevait la serviette du tour du cou pour montrer sa dextérité dans la valse, si l’équilibre le permettait. Le dessert, le café, la ‘’ gnole’’, la ‘’re-gnole’’.

     

                  Ainsi se terminait cet hommage aux bienfaiteurs du monde (vous mettrez qui vous voudrez !).

     

     

     

     

     

                 Ah ! La fête au village.

     

                 On l’attendait impatiemment pour la Saint Martin. Cet homme qui avait partagé son manteau avec le Christ. Les préparatifs battaient leur plein une semaine avant les festivités. Banderoles et calicots étaient placés aux entrées du village. La salle de bal était décorée de couronnes confectionnées avec du buis. Les ampoules multicolores éclairaient  les rues. Mais le temps fort de ce grand défoulement était l’arrivée de l’orchestre.  Dès le matin, une charrette décorée tirée par un cheval emportait les musiciens pour faire le tour de ville. Cet orchestre moderne qui a remplacé les anciens tambourinaïres jouait à la demande des familles, devant leurs maisons les morceaux préférés qu’elles avaient choisis. Ce qui permettait aux organisateurs de quêter un peu d’argent pour payer le bal.

     

                    L’après midi était réservée aux festivités enfantines.  La course en sac où il fallait sauter dans un sac à patates jusqu’à la ligne d’arrivée précédait la course de l’œuf. Il ne fallait pas faire tomber l’œuf placé dans une cuillère.

     

                    Puis s’en suivait le loto ‘’de la paroisse’’. Le dimanche précédant, sur sa chaire, le curé avait annoncé l’évènement. Toutes les paroissiennes étaient venues et espéraient  que la volonté divine allait leur faire gagner le paradis, non, le panier garni. Il fallait bien que tout le monde tire profit des festivités.

     

                   Fidèlement avec les traditions languedociennes, chaque famille confectionnait  ces pâtisseries légères connues sous le nom d’ ‘’oreillettes’’.  Elles étaient vendues au profit du bal.

     

                   Ce grand défoulement populaire commençait dans la salle de bal où les mamans, assises sur des chaises autour de la piste, surveillaient attentivement, faits et gestes des prétendants pour leurs filles surtout après une série de tangos. Le bal continuait par ‘’la paimpolaise’’ et le ‘’quadrille’’ avec ses cinq figures imposées. La danse symbolique en fin de soirée, ultime couillonnade, était réservée à la ‘’danse du soufflet’’ pour les parisiens ; la ‘’buffatière’’ pour les méridionaux. Inutile de vous faire un dessin pour illustrer cette farandole. Les danseurs, uniquement vêtus d’une chemise de nuit blanche et d’un bonnet de meunier se lançaient  dans  des tournoiements un peu rustiques. Chaque danseur était muni d’un gros soufflet rempli de farine. Et tourne, et vire et buffo  (souffle). Pour agrémenter la danse, le souffleur devait souffler dans le bas du dos du précédant qui à son tour levait sa jambe et émettait un tonitruant prout dans le nez du souffleur. Bien sûr, la veille au menu : haricots, fèves et navets. Les bals étaient parfumés, très festifs et parfois glissants.

               J'ai retrouvé sur un vieil almanach l'histoire de cette danse du soufflet dont l'histoire est la suivante:  Cela remonte au Moyen Age où les moines, le jour du Mardi Gras sortaient en procession dans les rues du village munis d'un soufflet. Ils soufflaient dans tous les sens  pour faire fuir les mauvais esprits.

              Ce jour de Mardi Gras était la réjouissance des villageois, ils dansaient, chantaient et s'amusaient dans les rues. Vint se mêler un jeune moine  qui dirigea son soufflet dans le dos et même plus bas  d'une femme de mauvaise vie ce qui fit rire encore plus fort les gens du village. C'était une façon singulière de refroidir le cul d'une femme qui avait "le feu au cul".

            C'est ainsi que la tradition  du souffle au postérieur est née. Aujourd'hui, dans quelques villages, la danse du soufflet perdure. Les hommes enfarinés de la tête aux pieds, vêtus d'une chemise de nuit de femme , d' un bonnet de coton sur la tête, exécutent un pas de deux. Le meneur porte un gros soufflet, celui qui servait au boucher à gonfler les toisons de moutons .

                Les hommes , sur deux rangs avancent pas à pas, tapent en cadence avec deux planches en se tournant à droite, puis à gauche en faisant le geste de souffler dans le postérieur de l'homme qui le précède . Ils chantent:

                       " Souffle lui au cul, la pauvre vieille

                         Souffle lui au cul qu'elle en a besoin   (bis répétita)

                          Et souffle lui et souffle lui (bis)

                  Les mauvais esprits ont été chassés mais l'histoire ne s'oublie pas.

                  Il parait que cette histoire est véridique, mais même si elle n'est pas vraie, elle est bien bonne à raconter.

     

                     Chico, le célèbre pétomane parisien qui animait de ses pétarades les entractes des pièces du théâtre  Mayol,  n’était rien de comparable à côté des amusements de nos grands pères.

     

     

     

                     Avec le charivari du Conseil de révision, ces quelques histoires gaillardes et truculentes prouvent que dans le temps, on savait s’amuser, sans trop boire bien sûr. Toutes ces traditions festives ont disparu depuis l’avènement dictatorial de la reine télévision.

     

                    

     

     

     

    A bientôt JC d’Oc.

     


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