• La côte lagunaire entre Bages et Port la Nouvelle

     

     

                       

     

    Alors! Raconte! N° 98 

     

                              La côte lagunaire entre  Bages et Port la Nouvelle. 

     

              Combien d'automobilistes qui, empruntant la A9 ou la A61 sont persuadés que l'eau qui miroite au soleil sur une longueur de 16 km parallèlement à la Méditerranée et sur une largeur de 11Km en venant de Perpignan et à l'approche de Narbonne est la mer du Golfe du Lion et non des étangs . Le plan d'eau de Bages a deux voisins qui le séparent de la mer, l'étang de l'Ayrolle et celui de Gruissan en utilisant avec ce dernier en séparation le canal de la Robine, ancien lit de l'Aude. De plus, la voie ferrée reliant Perpignan à Narbonne a été construite contre le canal en plein milieu de ces étangs . Pour localiser ce magnifique plan d'eau, il faut citer au Sud Port la Nouvelle où les bateaux les plus gros peuvent accoster. A côté les usines Lafarge.  A quelques pas, il y a Sigean avec sa réserve africaine et ses 800 animaux - réserve crée en avril 1974 par Paul de la Palouse et Daniel de Monfreid, fils du célèbre marin du pays qui a écumé toute la Mer Rouge. Tous les ans 350.000  personnes visitent ce parc où l'on assure la tranquillité des animaux dans le respect de leur milieux d'origine. A l'ouest, il y a deux villages très appréciés par les vacanciers, Peyriac de Mer et Bages, véritables viviers de marins avisés. Au Nord, c'est le port nautique de Narbonne qui héberge l'école de voile juste à côté de Madirac qui, historiquement était le port celtique de Narbonne. On y a retrouvé des pièces romaines, des amphores, une ancre marine de plus de trois mètres  ainsi que la structure d'un ancien embarcadère de plus de 15 mètres de long avec des madriers et des blocs de pierres taillées.

     

                   Puis il y a le Massif de la Clape qui calme un peu les ardeurs de la tramontane. Dans ces collines, il ne faut pas oublier de citer la chapelle des Auzils, sanctuaire vénéré par les marins. Puis il y a Gruissan avec sa célèbre Tour Barberousse construite vers la fin du 10ème siècle  pour protéger la Narbonnaise des éventuelles invasions venant de la mer. Les gros voiliers quittaient la mer devant  Gruissan où ils ''stationnaient''; les barques à fond plat remontaient par le fleuve Aude les marchandises jusqu'à Narbonne en godillant d'un étang à l'autre. Il fallait en ces temps incertains faire très attention aux bandits de grands chemins qui attendaient en embuscade. Les barques pouvaient donc remonter le fleuve jusqu'au port nautique de Narbonne et redescendre jusqu'à Port la Nouvelle par le Canal de la Robine. Ce circuit leur permettait d'avoir une issue de secours en cas d'attaque. Ces deux accès maritimes vers Narbonne ont permis à de nombreux petits  pirates locaux qui se faisaient passer pour être l'avant-garde de l'armada de galères du célèbre pirate Barberousse de faire régner la terreur sur les habitants de Gruissan et de sa région. Surtout que ces milliers de guerriers turcs avaient la réputation de ne laisser que terre brulée. Heureusement ces guerriers ne sont jamais venus sur nos terres. C'était une illusion stratégique qui perdura durant un bon siècle. Tout cela pour dire que les étangs de Bages, de Gruissan, de Campignol et de l'Ayrolle ont été des plans d'eau qui permirent les invasions arabes, des échanges commerciaux de toutes sortes, du troc et  un commerce florissant  avec la Narbonnaise.

     

                    Progressivement la physionomie du pays changea rapidement par l'action des hommes, du vent, par les inondations, par l'évolution des courants marins et heureusement, cette zone lagunaire non urbanisée,  sauvegardée par le Conservatoire du Littoral Languedocien n'a pas subi ces constructions grotesques que l'on retrouve chez nos voisins espagnols sur la Costa Brava. Ce pays audois a aussi été aidé par les gens de la lagune, gens de tempérament affirmé qui n'ont pas laissé les urbanistes venir polluer leur côte.

     

                     On dit beaucoup de mal du vent qui décoiffe les têtes plates des Audois mais il faut aussi voir que c'est un animateur permanant du ciel par ces nuages fuyants, de l'eau par leurs vagues et de la terre par des plages dont le sable sculpté rappelle le sol lunaire.

     

                     Ce vent qui souffle dans cette région plus de 300 jours par an,  peu apprécié sur les plages,  apporte du bonheur aux véliplanchistes, fait tourner les pâles des éoliennes de Port la Nouvelle. Le Cers appelé vent du Nord souffle 200 jours par an. Il est froid, porteur de pluie en hiver. Il peut entraîner une baisse des eaux de l'étang de plus de 50 cm en évacuant l'eau vers la mer. Le Marin, vent soufflant à l'opposé du Cers, doux et humide , fréquent en  fin d'année, apporte des pluies continues qui en 1999 ont provoqué des inondations. Sous l'effet du Marin, l'eau peut monter de plus de 80 cm par rapport au niveau moyen des eaux de l'étang. Donc fantastique variation des eaux d' 1m30 dans l'étang de Bages. Le Grec, vent venant de Agde donne des couleurs rouge et grenat aux eaux.

     

                       N'oublions pas les randonnées que nous faisons sur l'ex-île de Sainte Lucie, le long des nombreuses salines notamment celles de Gruissan, de Bages et de Peyriac de Mer qui nous laissent une impression surréaliste tellement que les vues sont belles du haut des dunes. A Peyriac de Mer, un cheminement piétonnier sur des planches à claire-voie a été aménagé à l'intérieur des salines qui étaient exploitées au temps des Romains. Cet aménagement permet sur une grande distance de se promener sur les hauteurs et de prendre du recul pour contempler le village qui laisse une agréable impression sur son environnement. Toute cette zone est protégée et même le ramassage des tellines est interdit depuis 1991. Les sentiers sont balisés et protégés.

     

                  Quelques petites îles émergent aux abords de cette zone lagunaire. L'île de la Planasse, face à Peyriac de Mer a des accès difficiles dus aux rochers immergés à moins d'un mètre, puis l'île de Lotte, face à la réserve africaine,  l'île du Soulier, fréquentée uniquement par les oiseaux, l'île de la Nadière entre l'île de l'Aute et la pointe des Oulous, l'île Sainte Lucie très protégée, interdite aux chiens. On y trouve un ancien domaine viticole abandonné qui abrite actuellement l'Observatoire des Etangs et un atelier de réfection de barques latines. On y voit aussi des caves et des pressoirs, vestiges de l'activité passée. Sur cette île, des chevreuils cohabitent avec les lapins et quelques chèvres sauvages. Très belle vue sur un panorama vers la mer, les étangs, les Corbières, Narbonne, sur les hauteurs du Haut Languedoc, le Canigou. Cette île de près de 3 km de long est accessible par un pont tournant. Puis l'île Saint Martin  entourée par l'étang de Gruissan, les salins de Saint Martin, l'étang de Campignol, l'étang de l'Ayrolle où de nombreux flamants roses y séjournent toute l'année. Leur couleur rose est due à une algue de couleur bleu-vert qu'ils mangent durant leurs premières années puis par des crustacés lorsqu'ils sont adultes. Il faut interroger un flamand de Bruxelles pour savoir !!

     

                   Les tables salines rapportent plus de 30.000 tonnes tous les ans. Dans les temps anciens, le sel servait a activer le feu de la cheminée mais aussi à éloigner les sorcières.

     

                   Les techniques de pêche sur les étangs n'ont pas évoluées depuis plus de 2000 ans. La pêche est pratiquée de façon artisanale avec des barques légères. Bien sûr, il n'y a plus de voiles mais des moteurs surpuissants. Les poissons migrent selon les variations de la mer qui entre ou qui sort de l'étang. Ce phénomène se retrouve sur toute la zone lagunaire, à Sète, à la Maïre de Sérignan ainsi qu'à Valras Plage. Les pêcheurs font des loups, des turbots, les mulets, les muges, des dorades surtout lors de leur migration en septembre lorsque la température de l'eau baisse. Les muges, ces poissons volants que l'on trouve sur le pont des bateaux sautent très haut de l'eau pour se débarrasser des parasites qui se collent sur leurs écailles. Puis, il y a les anguilles, ces poissons serpentiformes qui migrent très loin en mer et qui reviennent pondre dans les étangs. Les pêcheurs de Gruissan pratiquent une pêche artisanale en posant dans des endroits relativement larges de l'étang des capéchades ( filets à trois nasses) qui font barrage aux anguilles, mulets et dorades qui descendent de septembre à novembre pour goûter l'eau de mer. Il faut aussi dire que les dorades sont attirées par les filières à moules placées en mer. Dès le 15 septembre, les dorades descendent puis elles sont suivies par les anguilles vertes, les matures et les argentées jusqu'à fin novembre. La tramontane fait baisser le niveau de l'eau et trouble le fond de l'étang ce qui masque les filets au regard des poissons En décembre on supprime les capéchades car en hiver les mailles des filets peuvent être abimées par le gel. Les civelles remplissent vite les bourriches pour être exportées surtout vers l'Italie et l'Espagne. On pêche entre 900t et 1000t par an dans toute la zone lagunaire mais 59% d'anguilles échappent aux filets. Les Japonais en sont friands. Anguilles laquée - Unagie.

     

              C'est aussi le paradis des oiseaux qui viennent où qui vivent sédentairement dans les roseaux .

     

             Il faut visiter cet espace lagunaire, ses sites, ses salines en automne avec le petit train ou bien au printemps, lorsque les vacanciers ont délaissé le lieu. L'arrière saison est pour nous, gens du Pays d'Oc, la meilleure car on apprécie le calme,  la tranquillité du lieu et le passage des oiseaux migrateurs au dessus des plans d'eau.         JC d'Oc /2012

     


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