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Par JC34 le 19 Mai 2014 à 22:36
Alors! Raconte! N° 133
La cathédrale St Nazaire de Béziers.
La cathédrale St Nazaire de Béziers est un excellent observatoire sur la plaine où coule l'Orb. Avec ses 50m de hauteur, elle permet de voir sur 360° de l'Espinouse au Capcir, de la Méditerranée au Somail. Ce bâtiment est crènelé comme un château-fort. Du haut de son donjon, on apprécie la vue sur le moulin de Bagnols, le pont vieux de l'époque romaine, le pont neuf de 1845, le pont du chemin de fer qui date de 1846, le pont de l'Occitanie construit sous l'initiative de Georges Fontès en 1985, le pont du canal du midi en 1854. Cette cathédrale "des vignes" est l'image de la ville qui attire les regards et elle est visée par les appareils photos des touristes qui passent sur le pont neuf. Que l'on regarde la ville de toutes parts, la cathédrale impose par sa force, sa grâce par sa masse importante. Dès les premiers rayons du soleil, elle s'illumine. Ses tours sont menaçantes et austères. Ce bouclier architectural, un des plus beaux édifice gothique du Languedoc est une sentinelle qui surveille le fleuve Orb qui à ses pieds s' est endormi.
Le jardin des évêques, accolé au murs de St Nazaire. Lieu de recueillement des évêques. Calme, sérénité, havre de paix, ce jardin en terrasses descend vers l'Orb. Conçu comme une broderie dite à la française, c'est le patrimoine légué par les ecclésiastiques à la ville de Béziers. On y accède par le Plan des Albigeois. Ici se sont dressées les premières habitations du site en continu depuis le VIIème siècle avant JC. C'était l'époque de la brillante civilisation des oppida ( villages fortifiés sur les collines). Les Celtibères, les Grecs, les Etrusques et les Carthaginois ont commercé avec la ville.
Mais qui était Saint Nazaire ?
Le martyre Nazaire Africanus est né à Rome au 1er siècle de notre ère d'un père païen et d'une mère pieuse. Animé par ses vertus précoces envers la religion, il devint un fervent chrétien à Rome. Ses parents l'autorisent à aller prêcher la foi catholique. De villages en villages, ses prêches dans les populations païennes, ses visites aux chrétiens martyrisés dans les prisons finissent à implanter la religion catholique. Chassé de Rome avec ordre de ne plus revenir en Italie, il s'exile en France. A Nice, il rencontre un enfant qui s'appelle Celse. Après avoir baptisé ce dernier, ils ne se sépareront plus jamais. Les conversions étaient très nombreuses car le climat de l'époque aspirait à avoir moins de dieux païens et surtout moins de cruautés. Comme Napoléon nos deux évangélistes vont remonter le chemin qui mène à Embrun puis vers Grenoble. Leurs sermons , leur éloquence sur l'amour fou qu'ils donnent à JC convertissent de nombreuses personnes. Malheureusement, ils reviennent en Italie. Arrêtés à Milan, flagellés, ils sont conduits à Rome pour avoir la tête tranchée. Il parait que St Ambroise a retrouvé les tombes de ces deux martyrs. Les têtes n'avaient pas changé. Barbes, cheveux étaient restés intacts et un agréable parfum s'échappait de la sépulture . Enfin soit sur cette légende !
Mais revenons à notre cathédrale. En 897, il existait sur cet emplacement un cloître qui tirait ses revenus de domaines disséminés dans la région. Un peu avant le bouillonnement religieux de l'an 1000, les dominicains quittent le cloître et celui-ci disparait dans l'oubli des écritures. Reconstruit au XI ème siècle, d'une forme réactualisé comprenant son préau, son puits, sa salle capitulaire. Il s'adaptait au goût des fondements religieux de l'époque au dessus du mur impressionnant qui le soutient. Cette construction est la base de la cathédrale actuelle. Le cloître possédait des murs très épais couronnés de créneaux, des meurtrières et des mâchicoulis qui lui permettait de se défendre en cas d'attaque venant de la rivière . L'église a été construite sous trois styles bien distincts. Tout d'abord l'art carolingien pour le cloître d'origine (années 800 - 900 sous Charlemagne puis l'art roman aux voutes rondes (l'an 1000 - Plan St Louis -lors de la construction de la cathédrale. Puis lors de l'épisode sanglant de la Croisade des Albigeois en 1209, la cathédrale est brûlée par les Croisés, elle éclate comme une grenade. Il ne reste qu'une partie de la façade. A l'intérieur, de nombreux hérétiques sont passés au fil des épées et brulés( entre 8000 et 15000 à Béziers) . La voute s'effondre sur les gens. La cathédrale est sinistrée . Mais dès 1215, les travaux de reconstruction démarrent la rénovation sous l'égide de l'architecte Gervais. Sur sa base romane, une nouvelle cathédrale gothique renait avec ses murs très hauts qui montent vers le ciel, mais on accédait à l'intérieur de la nef par deux escaliers énormes de plusieurs marches. Autour de la cathédrale, les bâtiments des alentours destinés aux chanoines ont disparu lors des reconstructions. L'ancienne prison attenante n'était qu'une annexe pour les franciscains. Déjà, par prédilection les moines occupaient antérieurement les cellules que de nombreux prisonniers ont occupé récemment.
Les fouilles effectuées en 1938 sous la cathédrale ont permis de mettre à jour dans la partie sud de l'ancien cloître, côté prison actuelle, à cinq mètres de profondeur, sept salles qui ont caché des biterrois lors du sac de la ville par Simon de Montfort en juillet 1209 et pendant la Révolution française. Ces salles communiquaient avec les cellules de l'ancienne prison de Béziers par une grille qui était cachée par une petite cloison de 3 cm durant neuf siècles. Les prisonniers pouvaient, s'ils en avaient eu connaissance avoir la possibilité de s'évader par un souterrain qui menait aux anciennes arènes romaines situées Rue Canterelle. On peut visiter actuellement cette grille.
Cette cathédrale est la seule en France à posséder sur tous les murs sur lequel court le chemin de ronde des meurtrières et des mâchicoulis qui permettaient de se défendre et tenir un siège durant plus d'un an devant l'envahisseur. Sous la cathédrale il y avait des caves secrètes contenant des silos à blé et des citernes pour l'eau.
Aujourd'hui, on peut monter sur le chemin de ronde qui entoure le clocher par un escalier en colimaçon. Vous apprécierez ce que nous offre notre cathédrale, en dessous les fortifications millénaires, en face la belle plaine de notre Région biterroise et en haut le sauveur de l'humanité sur sa croix.
JC d'Oc 02/2014
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Par JC34 le 17 Avril 2014 à 22:08
Alors! Raconte! N° 131
Le passage de l'estive en 1948
Dessine moi un mouton ! J'ai sauté sur mes pieds comme si j'avais été frappé par la foudre. J'ai bien frotté mes yeux. J'ai bien regardé et j'ai vu.....
Comme le Petit Prince de Saint Exupéry,
Nous attendions avec nos yeux d'enfant de 8 ans le passage de près de 500 moutons. C'était lors de la première quinzaine de mai 1948 que les troupeaux passaient dans le village de Cébazan. Ils ne redescendaient qu'au mois d'août pour les jeunes agneaux et fin septembre pour la totalité des troupeaux, car l'agnelage était proche et les brebis n'aiment pas le froid. Il arrive même que des bêtes s'échappent du troupeau et reprennent seules la piste pour revenir au village.
Le printemps était chaud et dans les plaines de l'Ariège pyrénéenne, l'herbe était devenue rare et pour nourrir les brebis, il n'était pas rare que les bergers amènent leurs troupeaux en estive sur le Causse Méjean puis sur le plateau de l'Aubrac et de la Margeride où l'herbe était plus grasse. La draille de la colline de Montmajour , cette piste étroite et caillouteuse était réservée au passage des moutons qui montaient en estive, terme employé dans les Pyrénées. Dans les autres régions, les bêtes montent en alpage.
Les bergers qui guidaient les animaux étaient originaires d'Andorre. Ils devaient suivre un itinéraire précis. Vêtus de pantalons en velours, coiffés de grands chapeaux anticonformistes de feutre noirs, munis de leur bâton de berger dont la poignée était en forme de boule qui servait à tuer les serpents, ils encadraient cette masse mouvante de brebis qui descendaient la colline avec des chiens qui obéissaient au moindre sifflet du maitre. Le tintement des sonnailles des premières brebis annonçait leur arrivée. Passaient d'abord les premiers moutons, les meneurs, qui étaient les plus âgés. Ils reconnaissaient l'itinéraire qu'ils avaient emprunté l'année précédente Quelques ânes portaient le nécessaire de l'intendance.
En ce printemps tardif , le village était en émoi. Habitués depuis l'année 1942 à une telle manifestation, les gens, précautionneux avaient rentré tous les vases de fleurs qui décoraient leur devant de porte. Que faire pour un village de 350 habitants devant le déferlement de 500 animaux qui avalaient sur leur passage tout ce qui était vert. Ripaille appréciée: les géraniums des villageois. Par cette affluence massive d'animaux un bouchon dans la rue principale du village s'était formé et nous qui étions très jeunes, nous nous précipitions vers ces bêtes pour caresser cette fourrure épaisse qui sentait le suint . Nos mains après plusieurs lavages étaient très douces à toucher car elles étaient empreintes de lanoline.
Les pauvres fleurs qui n'avaient pas pu être rentrées étaient une proie facile, mais, consolation les brebis laissaient sur leur passage une couverture de "cagarelles", billes fécales qui activaient la repousse des racines de nos défuntes fleurs. Les chiens s'activaient autour des bêtes. Ces gardiens de troupeaux des "border Collie" avaient un poil long, l'œil toujours en éveil, fidèles à leur maître. Ils obéissaient aux ordres du berger à la patte et à l'œil. Ils comprenaient les gestes de la main que leur maître leur ordonnait de faire et le langage que seuls ils pouvaient interpréter " A stanga" : à gauche , "cultat": avance, "dréapta": à droite " spati": doucement Mais pourquoi un seul des trois chiens obéissaient à l'ordre verbal? Les autres restaient en attente du coup de sifflet qui les concernait. En effet, les chiens avaient été dressé les uns en Espagne et ne comprenait que le catalan, un autre en Provence et ne comprenait que le provençal et le dernier ne comprenait que le français. "chope la ! Nique la ! Couché ! Pas bouger !". Ils ne devaient jamais mordre sans raison ni aboyer. Ces chiens sont très intelligents il faut qu'ils soient juste où il faut et au moment où il faut et surtout très attachés à leur maître. D'ailleurs, le maître le leur rendait bien.
Mais les animaux qui devaient brouter au passage les herbes maigres se régalaient avec les jeunes pousses de pins. Ce fut le début de la déforestation des collines qui bien plus tard ont du être replantées.
De nos jours, les petits troupeaux existants n'estivent plus. Ils sont en train de mourir malgré l'encouragement à produire du lait pour faire le fromage des rois, le roi des fromages: le fameux Roquefort. On regrettera avec nostalgie ce patrimoine vivant. Pour qu'il y ait un réveil, il faudrait faire de grosses unités pastorales et cultiver du fourrage en Languedoc.
Enfin un premier pas vient d'être fait par une convention de désherbage signée sur le bassin versant du Lirou par les villages de Quarante , Creissan, Puisserguier et Cébazan. Depuis novembre 2013, Ricardo et sa femme Celine conduisent leurs 1000 brebis de pâturages en pâturages dehors sur des "hermas" et des terres incultes toute l'année, par tous temps, sans rentrer en bergerie. On dort à la belle étoile et l'on se lève avec le soleil. Ce projet éco-pastoral pourrait s'étendre dans d'autres communes, ce qui permettrait de nettoyer naturellement et gratuitement friches et champs. Des accords de pâture ont été signés avec Murviel les Béziers et le Faugèrois.
Les villages de Vendres, de Fleury et de Lespignan organisent tous les ans fin mai la fête de l'estive. Nous ne pouvons que louer cette belle initiative.JC d'Oc 02/2014.
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Par JC34 le 22 Janvier 2014 à 16:53
Alors! Raconte! N° 101
L'église abbatiale St Joseph à Mont Rouge près de Puimisson.
Cette église, située sur les premiers contreforts des Cévennes, sur une petite colline qui domine Puimisson, entre Béziers et Bédarieux, est devenue en quelques années un lieu de recueillement pour les pèlerins. Une congrégation de moines et quelques moniales ont petit à petit érigé sur cette colline qui domine des lignées de ceps de vigne un monastère de style roman cistercien. Ce lieu est dédié à Saint Joseph.
Mais, construire un monastère de nos jours est une folie. C'était le cas au Moyen Age et cela paraît démesuré et très ambitieux au 21ième siècle. Il n'est pas fréquent de donner une vie à un lieu destiné à la dévotion. Les techniques ont évolué mais la mesure de la tâche de travail demeure. Dans les années 1970, le Père René Granier, fondateur de la Congrégation St Joseph, choisit le Mont Rouge pour vénérer ce saint. Les premiers dons permettent la construction des premiers murs puis de la toiture. En 2011, l'église est construite et l'archevêque de Montpellier Guy Thomazeau consacre ce phare intellectuel, spirituel et culturel. Ce lieu qui domine la plaine accueille les premiers pèlerins et ceux qui viennent y faire retraite paisible. La congrégation rassemble actuellement 7 frères et 7 sœurs qui étudient dès 5 heures du matin puis qui se consacrent aux tâches journalières dont l'accueil des visiteurs et des pèlerins, la répartition du travail aux bénévoles qui viennent aider à la construction, à la commercialisation de l'artisanat monastique ( C.D- clips sur Internet- impression d'images pieuses…). Maintenant on parle pixels, il n'y a plus de manuscrits avec des enluminures. La congrégation recherche des mécènes mais l'édifice a jusqu'à présent était financé par les petits donateurs.
Il reste encore à réaliser la construction d'un monastère pour permettre aux religieux une pleine consécration à Dieu et surtout pour retrouver calme et sérénité.
La géométrie de l'abbatiale a une base composée de carrés et de cercles. La nef, comme les églises wisigothiques est dirigée Est / Ouest, si bien que le soleil, lors de son lever inonde par 3 baies le portail de l'entrée et l'oculus(lors du coucher) éclaire l'abside.
Le chœur de l'église a été décoré par M.Ivan Rupnik qui a déjà restauré la chapelle Rédemptoris Mater au Vatican ainsi que la basilique de Lourdes. Les stalles, sièges situés dans le chœur, sont réservées pour l'usage du clergé. Les sièges sont séparés entre eux par une petite cloison. Elles proviennent de l'abbaye de Cîteaux mais ont été rénovées par les moines de l'abbaye.
Les vitraux sont sobres en couleurs. Les pièces de verre dont la colorimétrie varie selon la luminosité du jour procure la solennité d'un espace sacré à ce lieu.
Les murs et le pavement en pierre calcaire beige de Beaulieu donne un réalisme de propreté et de fraicheur.
L'acoustique est particulièrement bonne et il n'y a pas d'orgues mais seulement trois cloches sur l'arc triomphal entre la nef et l'abside.
Ce chantier a déjà coûté 450 000 euros et son coût final s'élèverait à environ 3,7 millions d'euros.
Maintenant, on attend des miracles mais la première chose à quoi l'on pense c'est qu'avec beaucoup de patience, de volonté et de temps, on peut retourner des montagnes.
JC d'Oc 11/2012
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Par JC34 le 22 Janvier 2014 à 16:51
Alors! Raconte! N° 102
Le Canal du Midi
Construit sous le règne de Louis XIV, cette voie d'eau est toujours le plus ancien canal d'Europe. Pierre Paul Riquet, ingénieur concepteur le fait serpenter sur 241 km entre l'étang de Thau aux Anglous jusqu'à Toulouse au Port de l'Embouchure - Ponts Jumeaux. Il se prolonge jusqu'à Bordeaux par le canal latéral à la Garonne sur 193 km.
En 1681, il fut inauguré par Henri Daguesseau, Intendant du Languedoc qui a représenté le roi Louis XIV. Pendant la Convention, tant que les révolutionnaires faisaient confiance au roi Louis XVI, on l'appelait le Canal Royal du Midi, mais depuis le début on l'a appelé le Canal des 2 mers, celui qui relie l'Océane à la mer Méditerranée. La durée des travaux fut de 19 ans. Il comporte 328 ouvrages d'art - 63 écluses- 126 ponts- 55 aqueducs et 7 ponts canaux sans compter les écuries car il fallait des relais avec des chevaux frais pour tirer les péniches sur les chemins de halage et les maisons des éclusiers. Il est alimenté par 6 barrages.
2000 ouvriers au commencement des travaux, puis 12000 furent répartis en 12 divisions de 1000 personnes pour creuser l'ouvrage. Sur les chantiers on a trouvé des maçons, des tailleurs de pierre, des forgerons, des niveleurs, des charretiers, des voituriers, des maréchaux ferrants et une main d'œuvre locale bon marché.
L'idée générale de Paul Riquet était d'amener les eaux de la Montagne Noire jusqu'au seuil de Naurouze. Le relief et l'hydrographie furent étudiés par la Commission Colbert.
C'est le ruisseau d'Alzeau qui fut choisi comme source principale. Cette rigole canalisée de 50 km descend de la Montagne Noire au Nord de Saissac. Elle nécessita le travail de 294 ouvriers pendant 102 jours. Lors du creusement du canal d'essai en 1648, un gouffre s'est formé et la rigole se perdit. Le projet risquait de capoter par manque d'eau. Il fallait rechercher des captages bien plus loin dans les contreforts pyrénéens. Puis un jour, cette eau ressortit plusieurs kilomètres plus loin et elle rejoignit le Ruisseau de Laudot puis se déversera dans le Bassin de St Ferréol. Ce lac artificiel, inaugurée en 1667 a une superficie de 67 ha. Le barrage avec ses trois murs et sa superbe ''gerbe'' de plus de 15m de hauteur est l'attraction incontournable des Audois et des Tarnais. Puis d'autres réserves furent crées notamment le Lampy, le bassin hexagonal à Naurouze et enfin le barrage de la Galaube dans le lit de l'Alzeau en 1999. A Naurouze, point de partage des eaux Atlantique Méditerranée, le plus haut du canal avec ses 189m d'altitude, le trop plein de l'eau s'évacue automatiquement soit vers le côté Garonne et le reste alimente le canal côté Sète.
Coté océan, le canal du Midi arrive à Toulouse aux Ponts Jumeaux et rejoint le canal de Brienne puis celui de la Garonne où les eaux se marient. Pour remercier le concepteur, François Lucas réalisa un superbe bas relief entre les deux ponts. Cette sculpture en marbre de Carrare représente des motifs relatifs à l'Occitanie, à la Garonne et à la province du Languedoc.Revenons au bief de Naurouze où le canal descend lentement vers Carcassonne. A Trèbes, l'écluse de l'Aiguille est la mieux décorée du Canal. L'aqueduc de la Répudre est le premier pont Canal du Midi à Ventenac en Minervois. Puis, le canal passe sous le tunnel du Malpas avant de rejoindre les 9 écluses de Fonseranes à Béziers. C'est l'apothéose des grandes eaux. Rien ne vaut ce décors pour présenter '' Si le Canal du Midi m'était conté'' A Agde, la superbe écluse du Bassin Rond ouvrage très rare à 3 niveaux - un sas et trois portes. Au final, l'ex Royal Entre Deux Mers retrouve les eaux de l'étang de Thau aux Anglous à Marseillan.
Le pari de Paul Riquet serait atteint s'il pouvait l'inaugurer. Malheureusement il meurt un an avant la fin des travaux le 1er octobre 1680.
Si la grande histoire l'a oublié, la petite (souvent la véritable) apprend que pressé par les délais, les problèmes d'argent et l'usure du temps, Pierre Paul Riquet livra en réalité un canal présentant de nombreux défauts en particulier au niveau des croisements avec les rivières. Des portions de l'ouvrage, deux ans après sa mort, se sont vite obstruées par des graviers et des boues venus de la Montagne Noire. C'est Vauban qui se mit au service du canal en construisant des ponts-canaux et autres épanchoirs.
Plus de 60 000 platanes ont été plantés le long des berges. Ces arbres peuvent vivre 1000 ans et leurs pousses peuvent atteindre 50 cm par an, une hauteur de 25 à 30m. Depuis quelques années, ils sont atteints par le chancre coloré. Ils sont abattus à Portiragnes et à Bagnas. L'environnement ressemblera peut être un peu plus de ce qu'il était dès son début.
Mais ce qui nous interpelle, nous qui vivons dans le Biterrois, c'est à quoi sert cette carcasse métallique, ce plan incliné accolé aux 9 écluses de Fonseranes. Déjà, 9 écluses devaient franchir 21,5m de dénivelé sur une longueur de plus de 300m. Il ne reste que sept écluses en fonctionnement car les deux dernières ne servaient plus du fait de la construction du pont canal. Pour mettre le Canal du Midi, patrimoine mondial, aux normes européennes et en conformité avec le plan Freycinet, pour faire passer les péniches de plus de 38m, il fut construit dans les années 1960 un '' ascenseur à bateaux''. Ce principe est utilisé déjà en Lorraine à St Louis-Arzwiller, à Montech sur le canal de la Garonne et aux Fontinettes dans le Pas de Calais, mais aussi en Allemagne et en Belgique.
La technique originale est due aux ingénieurs Jean Aubert et René Bouchet. Dans ce plan incliné, une rigole en béton est alimentée par l'eau du canal. De part et d'autre de la rigole, une machinerie appelée bouclier-moteur lourde de 200t est montée sur pneus. Cette machinerie qui est entrainée par des automotrices diesel d'une puissance de 2 fois 1000 cv qui poussent en montant une pente de 3% et qui retiennent en descendant supporte le masque (grande cuve métallique étanche de 3,75m de profondeur) vitesse 4,5 km/h Une porte s'ouvre dans l'eau et emprisonne le coin d'eau dans lequel se trouve le bateau.
La péniche reste en position horizontale durant la montée. Arrivé dans le bief supérieur, le bouclier-moteur replonge dans l'eau, on égalise les niveaux d'eau automatiquement puis on ouvre la porte amont et la péniche est libérée.
Cette pente d'eau réduisait de 6mn le temps de franchissement des 7 autres écluses mais le trafic du vin et des céréales étant en forte baisse et victime surtout de nombreuses pannes, peu fiable cet engin n'a réellement fonctionné avec efficacité. Actuellement, il est laissé à l'abandon faute de moyens.
Voici comment on gaspille inutilement l'argent des contribuables. Que doit penser dans " l'eau de là" (jdm) notre Moïse du Languedoc P.Paul Riquet.
JC d'Oc 11/2012
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Par JC34 le 22 Janvier 2014 à 16:49
Alors! Raconte! N° 103
Le château de Sériège
La culture de la vigne a débuté du temps des Grecs, puis au 1er siècle les Romains ont implanté cette culture dans le Biterrois et les Corbières. Le temps passe et la vigne pissait son vin et il remplissait les foudres dans les caves.
A la fin du XIXème siècle " l'or avait la couleur du vin". La viticulture rapportait beaucoup d'argent et même de trop. Les propriétaires étaient tellement riches qu'il fallait le montrer et par orgueil, il fallait avoir un château plus beau que celui de son voisin. Le château de Sériège était l'image de la réussite et montrait la fortune de son propriétaire dans cette époque viticole où tout était permis. Il suffisait en 1880 d' un an de récolte pour payer la construction d'un château tant la vigne rapportait. Il fallait faire du tape à l'œil et les familles nobles excellaient dans ce genre.Comme on dit dans notre Midi " c'est un château qui a de la bouteille".
Situé en bordure de la route à trois kilomètres de Cruzy, dans un grand bois de pins où l'on aime respirer la résine et écouter en été le chant des cigales le maire de Cruzy Alexandre d'Andoque décida donc d'édifier pour son petit neveu seul héritier de son vaste domaine le château de Sériège. Construit en 1884 par un entrepreneur local, Andoque voulut s'inspirer du style renaissance italienne pour donner plus de clinquant à son château. Mais c'est un château " paravent". La façade est considérée comme cache- misère pour le reste du bâtiment. A l'intérieur un escalier monumental et un ascenseur équipé d'une corde était tiré par le personnel pour monter à l'étage les invités, devaient continuer à impressionner les visiteurs. C'était du "bling bling" surtout qu'il fallait passer au premier étage d'une chambre à l'autre sans couloirs pour aller se coucher. En fait, ce château était inhabitable et il n'a jamais été habité. Le "Vieux de Sériège" voulait-il jouer un bon tour à son petit neveu !
Mais le château de Sériège aussi beau qu'il soit n'a pas échappé aux aléas de l'histoire. Il n'a jamais été le digne représentant des" châteaux pinards" du Midi, mais il a été l'acteur lors des grandes grèves de 1904-1907 dont le meneur était Marcelin Albert, cafetier à Argeliès village voisin qui leva la bannière de la révolte viticole.
A peine installé sur le domaine qui à l'époque était le fleuron des domaines viticoles languedociens avec ses 354 hectares d'un seul tenant dont deux cents plantés de vigne, le neveu Alexandre d'Andoque est confronté aux premières grèves de 1904 . La propriété produit trop de vin. Sa cave accueillait quarante mille hectolitres et ne pouvait engranger la récolte de l'année qui arrivait avec quinze à vingt mille hectolitres supplémentaires. La production annuelle du Midi dépasse alors les 21 millions d'hectolitres. Le prix de l'hectolitre de vin chute de 41F an 1880 à 6F en 1900. Les grèves, son mariage raté, la mévente, excédé, Alexandre d'Andoque vend sa propriété à Edmond Bartissol, député des Pyrénées Orientales. Il part s'installer à Montpellier.
Le 8 octobre 1906, le régisseur congédia une soixantaine d'ouvriers journaliers, ne conservant que vingt gagés. La réaction fut immédiate. Les ouvriers congédiés empêchèrent la sortie des chais du vin nouveau. La pression monte et le fondé de pouvoir de Bartissol, ancien Ministre des Travaux Publics, fait appel à la troupe. Une compagnie du 100ème Régiment d'infanterie et deux pelotons du 13ème chasseurs sont reçus à coups de pierres par les grévistes, blessant quelques soldats. Par la suite Bartissol fut obligé de reprendre une cinquantaine d'ouvriers.
En 1910, Bartissol revendait le château et ses terres à André d'Andoque. Par héritage, l'aîné de la famille le colonel Alban d'Andoque prit la succession.
Aujourd'hui, le domaine est resté dans la famille Andoque. Il appartient à son fils aîné Gilles et à sa femme Geneviève qui depuis 1948, tradition oblige, ont connu une cinquantaine de grèves jusqu'à aujourd'hui.
Le château fantôme n'est toujours pas habité. Seules les pièces du bas servent à conserver quelques barriques de bon vin.
JC d'Oc 11/2012.
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